La glace version SM
Pourquoi s'étaler sur une serviette de plage en maillot par 30°C dans une palmeraie de bout du monde quand le simple fait de récupérer tes doigts après une onglée de 2 minutes te fait jouir dans un tumulte interminable des plus belles et fleuries insultes de ton répertoire... Savoir que plus t'as mal, plus c'est bon signe, c'est pas dément ça?!? Si CA c'est pas du SM...
Parce que la cascade de glace hivernale (pas de lapalissade ici, vous verrez qu'au prochain âge glaciaire on ouvrira de nouvelles lignes au 15 aôut) est au glaciairiste ce que la fistinière est au bouliste...tu sais que ça va piquer, t'as un peu peur mais à chaque fois tu kiffes et tu y reviens (ça s'en va et ça revient, c'est une chanson populaire - et pas que).
Ce côté SM, tu le retrouves très souvent quand tu grimpes en glace. SM pour "Sa Mèèèère" lorsque 6m au dessus de ta dernière broche cravatée celle que tu t’apprêtais à visser pour éviter un vol long courrier Paris-Nouméa en classe Eco refuse d'amorcer, t'échappes, et dans un cliquetis insondable disparait loin, loin en bas sous tes pieds et que, oh c'est con, t'en as plus... SM pour "Sauvez-Moi!" quand tu sens qu'il faudrait lâcher un bras pour poser cette broche (celle-là même que tu vas faire tomber) mais que comme c'est rigolo et étonnant tu le découvres à cet instant, ton bras fort est déjà plus fatigué que ton bras faible et que tes doigts te la joue Tex Avery en s'éloignant avec douceur et mesquinerie du manche de ton piolet... SM pour "Sainte Marie!" (aucune allusion désobligée ici) quand tu te mets soudainement à croire en Dieu, Mahomet, Vishnou, François Hollande ou même le Père-Noël pour peu qu'il soit capable de te sortir de là et t'éviter de regretter le temps où tu mettais des couches ou celui bientôt proche où tu en remettras... SM pour "Saperlipopette Mince alors" (traduction littéraire de Salope de Merde) quand ton casque se fissure en 2 après avoir amorti la chute d'un glaçon et évité à ton arcade déjà pleine de souvenirs de s'épandre sur le sol, comme tes intestins à cet instant précis. Vu que tu n'as pas voulu mettre de couche, CQFD.
SM aussi pour l'environnement dans lequel tu évolues. Étonnant de gueuler sur tous ces connards de la route qui roulent à 200 (en fait ils sont souvent plus nombreux) tout bourrés (pas ceux de la fistinière, les autres, ceux qui boivent) et qui risquent ta vie, quand toi-même tu te mets volontairement en déséquilibre instable sur un cigare (je ne parle pas ici de la position de Monica Lewinski mais du nom donné aux structures de glace verticales) instable lui aussi et que tu lui en mets plein la gueule à coups de pioche pour y ancrer les 10cm de lame (comme quoi la taille finalement, ça compte) salvateurs qui n'empêcheront toutefois pas ton bras de t’abandonner lâchement en ce moment de solitude absolue ou tu believe que tu can fly. Sans oublier les avalanches, redoux, spindrifts, chutes de glace, chute d'avions, chutes de grimpeurs, chutes de chevreuils, chute des cheveux, chut ça fait peur. SM je vous dis...
Et quand tout se termine bien tu es content et tu te demandes qui tu dois remercier pour ce casque qui a tenu (oui Petzl mais pas que), ce caillou qui a préféré le couloir aérien 10cm à ta gauche (contrairement à Germanwings), ce piolet qui a ancré au moment ou tu voyais la vierge. Alors, merci qui?
Et malgré tout ça, tu reviens, même pas peur, même pas mal (enfin, et c'est là où je limiterais la comparaison avec la fistinière, autant tu peux finalement t'en sortir indemne en cascade en sortant tant bien que mal par le haut, autant à la fistinière, si t'en sors c'est par le bas, et inévitablement avec quelques séquelles et plutôt avec tant de mal que de bien. Enfin j'imagine (comme disais John. Lennon, pas Wayne. Quoique j'en sais rien, ptet qu'il le disait aussi)
Mais bon, la glace c'est pas que de la souffrance. Ca c'est accessoire, c'est pour mettre du piment (qui lui aussi pique, surtout le lendemain). Le kiffe de la grimpe, de la gestuelle, la beauté des sites et des structures éphémères, le plaisir de la cordée (un peu pathos, je suis d'accord mais après la fistinière faut un minimum d'équilibre. Et à la fistinière, la corde ils connaissent).
Alors comme disait le célèbre grimpeur Kiki a.k.a Le Hamster, quelles que soient les conditions, "Armageddon!"
